Blandine Barthod apprend que « chaque goutte compte » dans le district de Kaski

par Blandine Barthod | 10 juin 2020
catégories : nepal, programme1

Image Blandine Barthod apprend que « chaque goutte compte » dans le district de Kaski
Après avoir préparé le dernier projet de l’IRHA au Népal assise devant mon ordinateur, j’étais très enthousiaste quand l'avion à destination de Katmandou a finalement démarré et décollé de l'aéroport de Genève. Quand mon collègue Marc Sylvestre et moi avons atterri dans la capitale du Népal, le tumulte des personnes et des véhicules était incroyable. Après avoir enfin trouvé un petit restaurant, et avoir vu les "momos" (raviolis à la farine de riz) que nous avions commandé brûlés et rempli le restaurant de fumée, il était clair que mon aventure au Népal allait être riche en émotions.

Laissant la foule de Katmandou derrière moi, je me suis assise assez stressée dans le bus pour Pokhara, qui se faufilait rapidement à travers les embouteillages – j’espérais que le véhicule avait de bons freins ! Mais lorsque la ville a cédé la place à des rizières en terrasses et à des collines couvertes de forêts subtropicales, toutes mes préoccupations se sont envolées. Alors que des bananiers poussaient sur les routes cahoteuses que suivait le bus, je pouvais aussi parfois apercevoir des sommets enneigés au loin. Comme le Népal est souvent associé à l'Everest et à l'Himalaya dans les médias français, il était surprenant de voyager dans un paysage semi-tropical. Mes a priori sur la géographie népalaise ayant été rapidement rectifiés, j'ai continué mon voyage à la rencontre de personnes aux emplois bien plus variés que le stéréotype des népalais-sherpa ne pourrait laisser penser.

Après avoir été accueillis par l’équipe Kanchan dans la ville de Pokhara, célèbre pour ses randonnées, nous nous sommes mis au travail. En lançant un nouveau projet d’aménagement des bassins versants, nous voulions visiter les bassins concernés et rencontrer les autorités locales et les membres de la communauté. Les gens nous ont dit que l'eau de pluie est une ressource très précieuse, et nous avons apprécié les réactions enthousiastes à notre projet d’aménagement des bassins versants.

Les réserves d'eau sont souvent transportées dans des villages isolés de la zone des collines du Népal grâce à l'énergie solaire. Cela a permis d'améliorer l’autonomie de certains agriculteurs. Cependant, le stockage local de l’eau de pluie dans des réservoirs et la gestion minutieuse des réserves d'eau souterraine disponibles restent nécessaires pour garantir l’accès à l'eau potable dans les communautés rurales et l’irrigation de leurs cultures.

La déforestation, associée à une mauvaise gestion de l'eau et à des pluies plus intenses pendant la période de mousson de plus en plus irrégulière, entraîne un ruissellement rapide des eaux de surface, des inondations soudaines et une érosion des sols. Les périodes sèches avec très peu de précipitations sont également de plus en plus fréquentes, et causent une grande aridité dans la région de Pokhara. Pour le bien-être de la communauté, il est donc essentiel de stocker l'eau de pluie dans les bassins versants locaux, et de recueillir davantage d'eau de pluie pour un usage local.

Prendre en compte les connaissances de la communauté locale et des différentes générations est essentiel lors de l'élaboration d'un plan de gestion intégrée de l'eau. Les personnes les plus âgées de la communauté ont en effet une relation différente avec leur environnement local : ils savent par exemple créer et entretenir de manière traditionnelle les pokhari (bassins locaux de collecte de l’eau de pluie). Comme l'a fait remarquer le directeur de l'IRHA, Marc Sylvestre, « On ne peut pas réparer un pokhari en le recouvrant de ciment. C'est comme si on faisait une piscine, et l'eau s'évaporera tout simplement. » C’est la solution de la technologie moderne. Mais les habitants plus âgés de la région vous diront que les bisons étaient utilisés pour faire disparaître les piscines boueuses, dans lesquelles l'eau peut lentement s'infiltrer et rejoindre ensuite la nappe phréatique. Voilà ce qu’est un pokhari ! C'est ce qui donne vie à la région de Pokhara !

J'ai rendu visite à l’organisation Kanchan Nepal juste après la mousson. Les collines étaient couvertes d'une végétation luxuriante. Je n’ai toutefois pas eu le temps de voir les mombins mûrs dans les arbres. Lorsque je suis arrivée, mes hôtes avaient transformé le fruit (appelé lapsi en népalais) en un chutney piquant, dont l’acidité intense ravivait la puissance du piment du plat de dal bhat que j'avais dégusté au brunch. Lors de ces repas, il était difficile d'imaginer la pénurie d'eau à laquelle étaient confrontées les communautés locales pendant la saison sèche. Les pluies tombent avant le festival de Tihar, célébration du lien entre la vie des hommes, des dieux et des animaux. En participant aux festivités, j'ai vu des chiens et des vaches portant des guirlandes de fleurs de soucis, des bougies et des mandalas créés pour honorer le divin sous toutes ses formes.

Dans une région où il pleut abondamment pendant quatre mois, puis où il ne tombe presque pas une goutte pendant les huit autres, je me suis rendu compte que chaque goutte compte vraiment : l'eau est précieuse. Elle est utilisée de manière très frugale. La plupart des ménages collectent et réutilisent les eaux usées faiblement polluées, et les femmes nouent du tissu au bout des robinets pour réduire le débit de l'eau. Comme ces femmes doivent souvent transporter sur le dos 25 kg d'eau provenant de sources locales pour les amener chez elles, je comprends pourquoi elles sont si prudentes avec l'eau qu'elles ont au robinet. Être témoin de cette prudence pour économiser l’eau était une vraie leçon d’humilité.

Après environ six semaines dans le district de Kaski au Népal, j'ai accompagné Kanchan Nepal pour une visite dans le district éloigné de Dailekh. Nous allions voir un projet de gestion intégrée de l'eau mis en place par l’association Helvetas. La pénurie d'eau reste un problème majeur dans cette région isolée et traditionnelle, où les femmes s'habillent en saris et portent des anneaux de nez si elles sont mariées, et où l'accès à Internet reste trop cher. Les pluies sont si rares dans cette région que les habitants doivent marcher jusqu'à deux heures pour aller chercher de l'eau potable dans les nappes phréatiques. Dans le village de Dullu, situé en dehors de la zone du projet Helvetas, l'eau est tellement rare qu'il est impensable de gaspiller cette précieuse ressource pour des tâches comme le lavage de la literie. Lorsque nos hôtes ont appris que nous visitions le projet Helvetas, ils ont voulu tout savoir de leur plan de gestion intégrée de l'eau. Lorsqu'il pleut à Dullu, beaucoup de gens ne dorment pas, car il est vital de récolter l’eau de pluie. Chaque goutte compte vraiment. En disant au revoir à Kanchan Nepal, je savais que cette devise me guiderait dans la coordination du projet de gestion intégrée de l'eau de l'IRHA avec mes collègues népalais.

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